Trois filles et un sofa
Texte de comédie de situation par Luc Boulanger
Les personnages
Sandy : Jeune fille à la mode genre mannequin, un peu maladroite
Déborah : Jeune fille gentille et serviable, grande amie de Sandy et sa colocataire, vêtements plus classe
Judith : Troisième colocataire, un peu nunuche et brusque, vêtements dépareillés, lunettes proéminentes
Jimmy : Beau jeune homme d’affaires, sûr de lui, bien mis
Monsieur Calloway : Agent d’artistes et de mannequins, vieux style, réservé, lunettes proéminentes
Monsieur Plummer : Plombier, poli et posé, salopette ou bleu de travail
Décors : Toute l’histoire se déroule dans l’appartement des trois filles au salon. Un sofa trône au centre. Il y a quatre portes. La première à partir de la gauche est celle de la salle d’eau, ensuite celle de la cuisine, puis la porte d’entrée et enfin, la chambre de Judith. D’autres accessoires peuvent agrémenter l’ensemble et ajouter à l’ambiance d’un appartement : petits meubles, lampes, cadres ou affiches.
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Scène 1
La scène peut débuter avec un thème musical qui suggère un sitcom américain.
Judith crie et sort de la salle d’eau.
Judith : Ah ! Je suis toute mouillée. Ça fait plus de deux semaines que le robinet gicle dans tous les sens. Je vais appeler un plombier immédiatement sinon personne ne le fera.
Judith prend son téléphone portable pour chercher un numéro. Elle tape un mot.
Judith : Quel est le plombier le plus proche ? Plomberie D. Boucher, 40 ans d’expérience. Ah non ! J’ai pas le goût qu’on m’envoie un vieux bonhomme (ou un vieux croulant). J’aimerais davantage un beau jeune débutant.
Elle continue à chercher.
Judith : Plomberie Dynamique, les superhéros de la plomberie, prêts à tout pour votre service. Intéressant ça. C’est peut-être ma chance !
Elle appelle.
Judith : Bonjour ! Notre robinet coule, on voudrait obtenir les services d’un plombier, oui… Le plus musclé possible… 265, 10e Avenue Appartement numéro 6… Je vais être surpris par la rapidité du service. Cool ! Quoi ? Vous voulez une photo du tuyau brisé. Pas de problème, je vous envoie ça illico. À plus !
Elle raccroche.
Judith : Une photo du problème.
Elle va rapidement dans la salle d’eau et revient.
Judith : J’envoie ça !
Elle pèse sur un bouton du téléphone.
Judith qui crie dans l’appart : Les filles, j’ai appelé un plombier pour réparer le robinet… Les filles…
Personne ne répond.
Judith : Ah ! Elles n’entendent jamais rien.
Judith part dans sa chambre. Sandy arrive par la cuisine.
Scène 2 de ce texte de comédie de situation
Sandy : Qu’est-ce que tu dis Judith ? Ah celle-là ! Bon ! Il faut que je trouve une solution, il faut vraiment que je trouve une solution rapidement.
Déborah arrive par la porte d’entrée. Elle tient deux sacs bien remplis.
Déborah : Allo la compagnie, j’ai fait les courses. Vous me devez chacune 18 dollars (ou balles).
Sandy : Déborah ! J’ai besoin de ton aide !
Déborah : Tu ne vois pas que j’en ai plein les bras.
Déborah tente de se frayer un chemin vers la cuisine, mais Sandy l’en empêche.
Sandy : Je me suis mise dans un beau pétrin.
Déborah : Encore !
Judith sort de sa chambre et reste en retrait. Elle va écouter la scène en silence.
Sandy : Je t’explique. J’ai un rendez-vous à dix-neuf heures ici avec un agent d’artiste qui a été impressionné par ma photo de casting et qui est prêt à prendre en main ma carrière de mannequin.
Déborah : Je ne vois pas le problème.
Elle tente encore une fois de passer avec ses sacs, mais Sandy s’interpose.
Sandy : J’ai également pris un autre rendez-vous ici à dix-neuf heures avec Jimmy, un jeune homme d’affaires spécialiste des placements en bourse qui est très intéressant. Tu comprends ?
Déborah : Ouais. C’est simple, appelle le beau Jimmy et dis-lui de venir plus tard. La carrière passe avant les amours. D’ailleurs, tu sais que tu es en retard sur ta part de loyer.
Sandy : Je sais, oui ! Mon problème, c’est qu’il y a eu un bogue sur mon téléphone et j’ai égaré les coordonnées de Jimmy.
Déborah : Quoi ? Tu as vraiment un don.
Sandy : Je sais. J’ai un talent fou pour me mettre les pieds dans les plats.
Déborah : Par chance, tu as d’autres talents.
Déborah essaie encore une fois de se rendre à la cuisine. Bien sûr Sandy l’en empêche.
Sandy : S’il te plait, aide-moi.
Déborah en pointant du nez les sacs qu’elle porte : Je suis débordée.
Sandy : Je t’en supplie.
Déborah : Comment veux-tu que je te vienne en aide ?
Sandy : J’ai pensé que tu pourrais faire patienter Jimmy à la cuisine pendant que je rencontre mon futur agent, Monsieur Calloway, au salon.
Déborah : Et qu’est-ce que tu entends par faire patienter ?
Sandy : Juste discuter avec lui, l’intéresser un peu. Tu lui poseras des questions sur son travail. C’est intéressant la bourse !
Déborah : Ouais. Demande à Judith pour une fois !
Sandy : Sois sérieuse ! Avec sa tête d’autruche, Judith fait fuir tous les hommes.
Judith fait une grimace de colère au public. De son côté, Déborah acquiesce.
Sandy : Tu es ma meilleure amie et je peux toujours compter sur toi. Si ça fonctionne, j’aurais des contrats de mannequin, un copain riche à craquer et je pourrai ainsi rembourser ma part du loyer.
Déborah : C’est bon, je crois que je n’ai pas le choix.
Sandy : Super ! L’affaire est dans le sac !
Elle tape sur un des sacs de Déborah qui passe près de les échapper.
Déborah : J’espère qu’il est gentil au moins ton Jimmy.
Sandy : Certainement, j’ai passé la nuit à clavarder avec lui, mais je ne l’ai pas encore vu.
Déborah : Quoi ? Tu ne sais pas à quoi il ressemble !
Sandy : Je l’ai croisé sur un site de rencontres où l’on est personnifié par un avatar.
Déborah : Tu perds un temps fou sur ces sites.
Sandy : Il aura un foulard rouge pour s’identifier.
Déborah : Je sens que ça va mal finir.
Sandy : Ne t’inquiète pas !
Déborah : Allez ! Viens m’aider à ranger les courses maintenant.
Déborah et Sandy se dirigent vers la cuisine. Judith reste seule.
Judith qui s’avance vers le public : Moi, une tête d’autruche ! Elles vont me payer ça. Si j’ai bien compris, l’appart va être plein de mecs ce soir. Excellent! Je vais en profiter !
On frappe à la porte.
Scène 3
Judith : Déjà ! Mes prières ont été exaucées.
Judith va répondre. Jimmy entre avec un foulard rouge autour du cou.
Jimmy : Bonjour mademoiselle, je viens rencontrer une certaine Sandy.
Judith avec un sourire en coin : C’est moi !
Jimmy : C’est vous ?
Judith : Oui, certainement.
Jimmy : C’est avec vous que j’ai discuté toute la nuit.
Judith : Oui, mon beau, la discussion est terminée, c’est maintenant le temps de passer aux choses sérieuses.
Judith prend Jimmy par le foulard et l’entraîne dans sa chambre.
Jimmy : Mais attendez, attendez !
La porte se referme. Sandy et Déborah reviennent dans le salon.
Scène 4 de ce texte de comédie de situation
Déborah : Je te préviens. C’est la dernière fois que je te sors du pétrin.
Sandy : Oui, oui. Ça ne se reproduira plus.
Déborah : J’ai de la difficulté à te croire.
On frappe de nouveau à la porte.
Sandy : S’il porte un foulard rouge, c’est Jimmy et je te le confie, si c’est monsieur Calloway, je m’en occupe pendant que tu attends l’autre. C’est compris ?
Déborah : Cinq sur cinq.
Sandy va ouvrir la porte et M. Plummer entre en salopette ou bleu de travail, mais, par le plus grand des hasards, il porte également un petit foulard rouge.
M. Plummer : Bonjour mesdames, c’est un peu frisquet aujourd’hui.
Les deux filles sont surprises, car elles pensent qu’il s’agit de Jimmy, l’homme d’affaires spécialiste de la bourse.
Déborah : Vous portez des vêtements étranges pour quelqu’un qui exerce votre métier.
M. Plummer : C’est l’habit de travail que tous mes confrères portent.
Sandy : Ah bon ! C’est vrai que la mode est au rustique.
M. Plummer : Voyons votre affaire !
Sandy : Pardon !
Déborah : Ah oui ! Je comprends, vous êtes un homme d’affaires.
M. Plummer : Si vous voulez ma petite dame. Alors, où ça se trouve ?
Sandy : On va d’abord s’asseoir au salon.
M. Plummer : Je ne sais pas si je devrais.
Déborah : Oui, oui, je vous en prie.
M. Plummer : C’est vous qui décidez !
Sandy et Monsieur Plummer s’assoient dans le sofa. Déborah reste debout. Un petit silence gêné s’installe.
Sandy pour alimenter la conversation : Vous qui êtes dans les affaires, vous n’auriez pas un petit tuyau pour nous ?
M. Plummer : Ah, des tuyaux, j’en de toutes sortes : des petits, des longs, des minus, des costaux, mais les plus fiables, à mon avis, sont ceux en cuivre.
Déborah : Vous voulez dire qu’on devrait investir dans le cuivre ?
M. Plummer : Le cuivre, le fer, l’acier inoxydable… Ça reste toujours des valeurs sûres.
Sandy : Si je vous demande ça, c’est que je suis un peu à sec par les temps qui courent. J’ai besoin d’être remise à flot.
M. Plummer : Si vous êtes à sec, vous n’avez qu’à ouvrir la valve et l’eau va jaillir.
Déborah : J’aime votre manière de vous exprimer, c’est très imagé.
Tout d’un coup Jimmy sort en criant de la chambre de Judith. Son visage est couvert de rouge à lèvres.
Jimmy : Non ! Non ! Non !
Judith le rattrape par le collet et le repousse dans la chambre.
Judith : Cette fois, je vais verrouiller la porte et il ne pourra s’échapper de nouveau.
Elle se tourne vers les trois autres.
Judith : Excusez mon nouveau copain, il est un peu trop exubérant. Bon, je dois replacer ma coiffure.
Judith s’en va dans la salle d’eau.
Sandy un peu mal à l’aise : Passons à la cuisine. On va y être plus tranquille.
Déborah : Vous désirez un petit café ?
M. Plummer : Je ne voudrais pas exagérer.
Sandy : Allez, laissez-vous gâter un peu !
M. Plummer : Et pourquoi pas ! J’ai eu une journée plutôt difficile à colmater des fuites.
Déborah : Des fuites d’informations ?
M. Plummer : Des fuites tout court. Croyez-moi, il y a eu beaucoup d’action aujourd’hui.
Sandy : C’est très intéressant. Je voulais justement m’acheter des actions.